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II. LIVRE

(Tenant vn peu l’œil baiſſé)
Pardon de m’auoir laiſſé.
Car en lieu de ſix adonques
I’en demanderay plus qu’onques
Tout le Ciel d’eſtoiles n’eut,
Plus que d’arene pouſſée
Aux bords quand l’eau courrouſſée
Contre les riues s’eſmeut.




ODE XVII.



POur boire deſſus l’herbe tendre
Ie veux ſous vn Laurier m’eſtendre,
Et veux qu’Amour d’vn petit brin
Ou de lin ou de cheneuiere
Trouſſe au flanc ſa robe legere,
Et my-nud me verſe du vin.
» L’incertaine vie de l’homme
» De iour en iour ſe roule comme
» Aux riues ſe roulent les flos,
» Puis apres noſtre heure derniere
» Rien de nous ne reſte en la biere
» Qu’vne vieille carcaſſe d’os.
Ie ne veux ſelon la couſtume,
Que d’encens ma tombe on parfume,
Ny qu’on y verſe des odeurs :
Mais tandis que ie ſuis en vie,
I’ay de me parfumer enuie,
Et de me couronner de fleurs.
De moy-meſme ie me veux faire
L’heritier pour me ſatisfaire :