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DE LA MORT

J’irai tenir sur les fonts du baptême
Ton fils… — Qui, vous, Monseigneur ? — Oui, moi-même.
Ne suis-je pas un bon parrain ? — D’honneur,
Vous êtes riche et puissant, Monseigneur ;
Vous n’avez pas, comme nous, vos esclaves,
La pauvreté, la faim à la maison ;
Mais vous avez du blé mûr à foison
Dans vos greniers, et du vin dans vos caves.
Certe, il n’est pas, aux environs d’ici,
J’en suis certain, de père de famille
Qui pour parrain, pour son fils ou sa fille,
Ne vous voulût, — non, pas même à Nancy,
Tant votre nom sur tout le duché brille !
Et cependant, Seigneur, foi de Thibaut,
Recevez-en mes très humbles excuses,
Vous n’êtes pas le parrain qu’il me faut.
— Si je t’entends, manant, tu me refuses,
Reprit le comte alors, d’un ton plus haut :
Et la raison ? — L’idée est singulière,
Mais c’est la mienne, et j’irai jusqu’au bout :
Pour mon compère il me faut avant tout
Un homme juste et de justice entière.
— En vérité ! — Monseigneur, c’est ainsi.
— À la bonne heure ! Ainsi donc, à ton compte,
Je ne suis pas juste, moi ? dit le comte.
— Ah ! Monseigneur, vous l’êtes, mon Dieu si !