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comme je souhaite, je veillerai à ce qu’on place près de lui, dans son cercueil, pour régler et stimuler sa décomposition, l’Art des Vers d’Auguste Dorchain !

Le vieillard ne se départit point de sa courtoisie, et continua :


Je suis dans le chef-lieu notoire de la Nièvre.
Avant-hier un exprès m’annonça qu’une fièvre
Venait d’y terrasser mon grand-oncle Prosper.
Je le sais possesseur d’un capital péper,
Et j’eusse déploré qu’à gauche il passât l’arme
Sans être le témoin de ma sincère alarme.
Je me hâte, je cours, je bondis à Nevers.
Hélas ! La destinée est féconde en revers.
Mon grand-oncle Prosper ressuscite à ma vue.
Ce triste événement m’a laissé l’âme émue.
Mais rien ne périra de nos projets altiers !
Non ! La pédale encore est promise à nos pieds.
Je languis à Nevers, trois, place de Barante.
Prends de ce pas le train de quatre heures quarante.
Je serai sur le quai dès neuf heures moins dix,
Mon chapeau, mon mouchoir et mon âme brandis.