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à l’arrière, resserra d’un cran la courroie qui attachait au cadre un petit sac de voyage ventru comme une vache pleine.

Puis il revint à son lit, et d’un pied fureteur il chercha un recoin des draps encore frais.

Il était heureux. Son cœur faisait allègrement sa besogne. Une fièvre légère le caressait à fleur de peau. Il anticipait sur la joie du départ, il en pressentait l’entrain et la vaillance. Il entrevoyait des routes longues et droites entre des peupliers, de petites routes torses et fugaces, des montées qui portent une auberge à leur bout. Il escomptait des aventures singulières. Déjà le sommeil de toutes ces espérances commençait à faire des songes.

Bénin rêva qu’on lui chantait un poème dans une langue d’Orient :

La nuit existe,
Et le roi va dormir.
Il va naviguer sur le sommeil, comme sur une mer entourée par ses possessions,