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Corps d’hussards ench’vêtrés à des cadav’ de zouaves ;
Des pêl’-mêl’ d’homm’ et d’arm’, de bagag’ et d’ fourgons ;
D’la ch’valin’ roug’ de sang et tout’ mousseus’ de bave,
S’plaignant, par tas serrés, sous des meul’ de dragons ;

Des cous d’décapités qui pench’ leur moignon rouge
Sur des énorm’ boulets qu’ont l’air de les railler ;
Des mulets ruant encor sur des blessés qui bougent
En v’lant prendre au hasard des morts pour oreiller ;

Casques pleins d’terre et d’sang, de ch’veux et d’morceaux d’crâne ;
Tambours crevés, clairons tordus comm’ des serpents ;
Des mourants qui font peur malgré qu’i’s ont l’air crâne
Avec les doigts coupés, l’œil vid’, la cuiss’ qui pend ;

Sous des gross’ mouch’ de viand’ qui s’appell’ et s’rassemblent,
Verminant leur voltige à tourbillons mêlés,
Des grands monceaux qui r’muent, qui s’soulèv’, qui tremblent,
D’où sort des voix d’cavern’, des gémiss’ments râlés :

V’la c’que j’ai toujours vu sur tous les champs d’bataille !
Sans parler d’la puanteur qui m’en donne encor froid…
Et des band’ de corbeaux qui s’gorgent les entrailles
De tout c’mond’ pourrissant par le capric’ des rois.