Page:Rollinat - Les Névroses (Fasquelle 1917).djvu/76

Cette page a été validée par deux contributeurs.


LE SUCCUBE


 
Toute nue, onduleuse et le torse vibrant,
La fleur des lupanars, des tripots et des bouges
Bouclait nonchalamment ses jarretières rouges
Sur de très longs bas noirs d’un tissu transparent,

Quand soudain sa victime eut ce cri déchirant :
« Je suis dans un brouillard qui bourdonne et qui bouge !
« Mon œil tourne et s’éteint ! où donc es-tu, ma gouge ?
« Viens ! tout mon corps tari te convoite en mourant ! »

À ces mots, la sangsue exulta d’ironie :
« Si tu veux jusqu’au bout râler ton agonie,
« Je t’engage, dit-elle, à ménager ta voix ! »

Et froide, elle accueillit, raillant l’affreux martyre,
Ses suprêmes adieux par un geste narquois
Et son dernier hoquet par un éclat de rire.