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Ma pitié du cheval déplaît au cocher gras :
Encore un qui s’en vient prêt à me chercher noise !
Et voilà que sa rosse hypocrite et sournoise,
Pour me remercier veut me couper le bras.

J’allonge mon chemin, pour éviter la Morgue,
Enfin débarrassé d’un affreux babillard,
Quand l’apparition d’un pauvre corbillard
Me surprend tout à coup devant un joueur d’orgue.

Un pâle individu me bouscule en tremblant ;
D’abord, je vois du vin qui suinte aux commissures
De ses lèvres, et puis un tas de vomissures
Me révèle pourquoi l’homme a le teint si blanc.

Triste, et plus recueilli qu’un moine de la trappe,
Je vais, lorsque soudain mon chapeau s’envolant,
M’expose au ridicule âpre et désopilant,
Puisqu’il me faut courir pour que je le rattrape !

Toujours le mot Complet à tous les omnibus :
Si bien, qu’enfin juché sur une impériale,
Je subis la prunelle inquisitoriale
D’un long monsieur coiffé d’un funèbre gibus.

Je vois un ami poindre. Enfin ! C’est une fiche
De consolation… Mais cela, c’en est trop :
L’ingrat, pour m’éviter, gagne un mur au grand trot,
Et fait semblant de lire une très vieille affiche.