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BALLADE

DE LA PETITE ROSE ET DU PETIT BLUET


 
Nomade confident des herbes et des plantes,
Impalpable éventail du sol âpre et roussi,
Caresse des lacs morts et des rivières lentes,
Colporteur de l’arôme et du murmure aussi,
Le zéphyr m’a conté l’histoire que voici :
« Dans un mélancolique et langoureux voyage
« Que je fis tout au fond d’un jardin sans grillage
« Où des quatre horizons le mystère affluait,
« J’entendis tout à coup le charmant babillage
« De la petite rose et du petit bluet.

« Sans doute quelque fée aux mains ensorcelantes
« Leur donnait le pouvoir de cheminer ainsi,
« Car elles s’en allaient, ces fleurettes parlantes,
« Du matin jusqu’au soir, vagabondant par-ci,
« Par-là, causant d’amour et n’ayant nul souci.
« Leur tendresse n’était que de l’enfantillage ;
« Mais pourtant dans les coins ombrés par le feuillage
« Le couple si folâtre était parfois muet,
« Et je n’entendais plus le joli verbiage
« De la petite rose et du petit bluet.