distincts chez Péri. L’un fut peut-être hautain et désagréable. L’autre ne conquiert pas seulement l’estime ; il attire la sympathie. Il avait quelque chose de triste et de passionné. Bonini dit que son talent était « di concetto lagrimevole; » il dit encore « qu’il faisait toujours pleurer, quand il chantait « materie lugubri , corne suo proprio talento. » D’autres parlent de « sua dolce e affettuosa maniera. » Encore aujourd’hui , ses airs d’Orphée touchent par leur profonde mélancolie, et il n’est pas douteux qu’un grand acteur ne puisse en les chantant , nous arracher des larmes, comme au temps de l’auteur. Doni et tous les bons juges parlent avec admiration de sa noblesse d’art et de sa simplicité tragique. Piero Bardi loue sa science et le naturel de sa déclamation (1). Sans avoir peut-être l’abondante verve de Gaccini, il l’a surpassé par la noblesse de ses pensées. Moins musicien de race, surtout moins Italien, Péri est un poète; et si l’on cherchait les devanciers de l’opéra français, peut-être ne trouverait-on personne qui annonçât aussi bien que lui la tragédie de Quinault et Lully.
Deux autres hommes, amis du comte de Vernio, jouèrent, sans être musiciens, un rôle important dans la réforme de la musique. L’un était le poète Ottavio Rinuccini ; l’autre, le savant Jacopo Corsi. Celui-ci, riche, instruit et artiste , fit généreusement profiter de sa fortune et de son expérience les musiciens et leurs œuvres (2). L’autre voulut être et fut le poète attitré du nouveau
(1) « Pcri aveva più scienza, e trovato modo con ricerchar poche corde, e con altra esatta diligenza d’imitare il paiiar familiare, acquistô gran fama. Giulio (Caccini) ebbe più leggiadria nelle sue invenzioni. » (P. Bardi.)
« Péri fu ancora nell’ arte di sonare di tasti leggiadro et artifizioso, e nell’ accompagnar il canto con le parti di mezzo, unico e singolare. » (Bonini.)
« In Giulio Romano vi si scorge maggior varietà di pensieri, ma nel Péri più nobili e uno stilo direi più tragico, siccome quell’ altro (Monteverde?) ha più di comico, esscndo quello più ornato e questo più scmplice e maestoso. » (Doni, Trattato délia musica scenica, p. 44.)
(2) « Jacopo Corsi, che infiammatosi , e non contcnto, se non dell’ eccellente in qucst’ arte, instruiva que’ compositori, con pensieri eccellenti e dot- trine mirabili, corne conveniva a cosa si nobile. » (Lettre de Piero Bardi.)
Corsi s’était lui-même occupé de la composition de la célèbre Dafné. On trouvera deux morceaux de lui dans un manuscrit de Bruxelles, 8450, litt. f. Il mourut en 1604. Voir, dans le deuxième livre des madrigaux à 5 voix de Marco da Gagliano, 1604, des morceaux pour la mort de Corsi.