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70 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

pas beaucoup plus heureux, à cause de la multitude des passages d'agrément sur les syllabes brèves ou longues qui empêchaient d'entendre les paroles. « Ayant donc vu que de telles musiques ne donnaient d'autre plaisir que celui de l'oreille , et qu'on ne pouvait émouvoir l'intelligence sans le secours des paroles (1), » il vint à l'idée de Gaccini « d'inventer une sorte de chant où l'on pût comme parler en musique. Il commença à composer des chants pour voix seule, qui lui semblaient plus propres à émouvoir et à plaire que des combinaisons de plusieurs voix en- semble. » Ces madrigaux à une voix (2) furent entendus avec « d'amoureux applaudissements (3) » dans la « Gamerata » de Bardi. Encouragé par le succès, mais voulant l'éprouver encore sur des gens moins prévenus que ses amis de Florence, Gaccini se rendit à Rome , où il fit exécuter ses œuvres dans les salons, — chez Nero Neri , Lione Strozzi , etc. Il y acquit la certitude qu'il était dans la bonne voie et prit confiance dans ses forces (4). De retour à Florence, il eut l'idée de créer un genre de can- zone poétique et grave , avec accompagnement de plusieurs ins- truments à cordes (5). Il s'adressa aux poètes gentilshommes de sa connaissance; Gabriello Ghiabrera lui fournit des vers dans tous les mètres. Il en mit en musique un très grand nombre, se faisant ainsi la main au nouveau style drama-

��(1) « Veduto adunque, che tali musiche e musici non davano altro di- letto, fuori di quello che poteva l'armonia dare ail' udito solo, poichè non potevano esse muovere l'intelletto senza l'intelligenza délie parole, mi venne pensiero introduire una sorte di musica per cui altri potesse quasi che in armonia favellare, usando in essa una certa nobile sprezzatura di canto, trapassando talora per alcune false, tenendo perô la corda del basso ferma, eccetto che quando io me ne voleva servire ail' uso comune, con le parti di mezzotocche dall instrumcnto, per esprimere qualche affetto, non essendo buone per altro. » (Nuove Musiche).

(2) Madrigaux : « Perfidissimo volto; — Vedro '1 mio sol; — Dovrô dun- que morire, » et un air sur l'églogue de Sannazar : « Itene ail' ombra, » — écrits a dans ce style, » dit Caccini, « que j'employai ensuite pour les piè- ces qui ont été représentées avec chant, à Florence. »

(3) « Amorevole applauso. »

(4) On lui dit que jusqu'alors on n'avait jamais entendu chant d'une voix seule sur un simple instrument, qui eût eu tant de force pour émouvoir le cœur, « ...dicendomi per fine a quei tempi non haverc udito mai armonia d'una voce sola sopra un semplice strumento di corde , che havcssc havuto tanta forza di muovere l'affetto dcll' animo quanto quei madrigali. » (Nuove Musiche.)

(5)jTJusqu'alors , d'après Caccini , on ne composait guère que des canzo- nette sur paroles assez brèves. ♦

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