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ment : « Je puis dire que j’ai plus appris de ces doctes entretiens que de plus de trente ans de contrepoint (1). »

L’esprit le plus intéressant de ces réunions devait être Vincenzo Galilei (le père du célèbre savant). Musicien et lettré, élève de Zarlino, il était nourri de l’antiquité, et professait le plus profond mépris pour les « Goths (2) » (entendez, pour les restes de l’art du moyen âge, contrepoint et madrigal). Ce fut lui sans doute, qui donna à l’Académie sa tournure réformatrice et archéologique. Son Dialogue de 1583 est une œuvre de combat; armé de l’art antique, il met en lumière les erreurs de la musique de son temps (3). Il ne s’aperçoit pas que le but est autre et les moyens différents. Au reste, partisans et adversaires de la musique moderne, se rencontrent dans l’éloge exagéré des anciens. Moins de dix ans après, Artusi écrasera les novateurs avec les mêmes exemples qui leur ont servi à condamner leurs devanciers (4).

Les théoriciens italiens partent de ce fait (attesté par les écrivains antiques), que la musique grecque, disposant de moyens plus simples, produisait des effets plus puissants (5). Ils l'expli-

(1) « Posso dire d’ havcre appreso piîi dai i loro dotti ragionari, che in più di trenta anni non ho fatto nel contrappunto. » (Caccini, Nuove Musiche, 1601, préface.)

(2) « ... Sous le flot des Barbares, toute science s’éteignit, comme si tous les hommes étaient tombés dans une lourde léthargie d’ignorance; ils vivaient sans désir de savoir, ils avaient de la musique la même idée que des Indes occidentales, et ils persévérèrent dans cette cécité jusqu’à ce que d’abord le Gafurio (a), puis le Glareano (b) et enfin le Zarlino (c) , princes vraiment de cette nouvelle science, commencèrent de chercher à la tirer des ténèbres. » (Galilei, Préambule des Dial.)

(3) Galilei publie en même temps trois vieux hymnes grecs, aux Muses, à Apollon, à Némésis, dont un de ses amis, noble florentin, avait pris exacte copie sur un manuscrit grec qui appartenait au cardinal S. Angelo, à Rome. Il donne aussi le traité d’Aristides Quintilianus et de Bryennius sur la musique.

(4) Artusi Gio Maria di Bologna. L’ Artusi, Overo délie imperfetlioni délia moderna musica, ragionamenti due. Venise, Vincenti, 1600, in-fol.

(5) Ils reproduisent les exemples connus de Pythagore, de Démodocus dans l'Iliade, de Timothée et d’Alexandre, de l’aède qui protège la chasteté de Clytemnestre, de Thalès de Candie délivrant de la peste les Lacé-

a) Gafurius Franchinus Laudensis. Theoricum opus musice discipline. Naples, Fr. Dini, 1480, in-4o (Bologne, Lie. Mus.). — Theorica Musice. Milan, Mantegat, 15 déc. 1592, in-4o. — Practica musice, sive musicen actioues, in-4 lib. Milan, Signerre, 1496, in-fol. Venise, 1512, in-fol.

6) Glareanus Henricus (voir plus haut).

c) Zarlino Gioseffo da Chioggia. — Opère, 2 1. Venise, 1589, in-fol., voir chap. IV.