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30 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

bleaux de la vie et des scènes extérieures. Les Français se distinguent au premier rang de ce genre, qui n'a cessé de leur être cher. Le plus vigoureux de tous, Clément Jannecquin, imite « le chant des oyseaux » (le rossignol et l'alouette), « le caquet des femmes » (verger de musique), les rumeurs des batailles (« la prinse de Boulongne, » la bataille de Metz , la bataille de Renty, la bataille de Mawgnan), le tumulte des chasses (lâchasse du cerf) (1). Nicolas Gombert suit ses traces avec le Chant des Oiseaux et la Chasse du Lièvre; Verdelot (2), dans sa Chasse au Lapin. Les étrangers ne sont pas en retard. J. Eckard , de Kœ- nigsberg, peint en vives couleurs le Tumulte de la place Saint- Marc (1589) (3); Alessandro Striggio raconte la Dispute des fem- mes au lavoir (1584), et Giovanni Croce écrit des suites de monologues ou de scènes bouffonnes (4) dans les Mascarale piace- vole(\b90) } et la Triacca musicale (1597) (« Il gioco dell'oca, » « la canzonetta de bambini, » le combat du coucou et du rossi- gnol, jugés par le perroquet).

Ce double mouvement religieux et mondain vers le sentiment dramatique et la recherche pittoresque, est surtout curieux par l'instrument d'expression qu'il emploie. Ce n'est pas en effet le chant accompagné d'orchestre, comme aujourd'hui, mais le chœur à plusieurs voix. Que la musique ait à mettre en scène un seul personnage, ou à peindre un tableau animé, le quatuor des voix représente tour à tour le poète et ses héros. L'usage des chants à une seule voix s'est à peu près perdu dans l'art du seizième siè-

��(1) Verger de musique contenant partie des plus excellents labeurs de M. C. Janequin, à quatre et cinq parties, nouvellement imprimé en 5 volu- mes, reveuz et corrigez par luy-mesme. Premier livre : T. Paris, Adrian le Roy et Robert Ballard, 1559, 45 p. (Bibl. Nat., rés, V^-195).

M. Weckerlin a publié la Bataille de Marignan, in-8° obi. Bologne, Wol- fenbùttel, Munich, Oxford ont diverses éditions d'œuvres de Jannequin (1531-1540).

(2) Philippe Verdelot , belge , né vers la fin du quinzième siècle , vécut à Florence entre 1530 et 1540.

(3) « On y voit le noble qui se promène fièrement, l'effronterie de deux mendiants acharnés, le crieur qui, à chaque reprise, hausse son chant d'un ton, pour dominer le tumulte; le soudard étranger, dont le chant à boire sert de base à tout le mouvement harmonique. » (Winterfeld.)

(4) On sent déjà l'origine de ces bouffonneries dans les Frottole à 4 voix, genre très répandu en Italie à la fin du quinzième siècle. C'est un chant trivial, grossier, en style macaronique, souvent inconvenant, où la mélodie domine à la voix supérieure. — De 1504 à 1508 paraissent 9 volumes de Frottole.

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