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L'OPÉRA EN ANGLETERRE. 293

Shakespeare. Nul poète moderne n'a fait une si grande place à la musique dans son œuvre, et ne lui a fourni d'aussi charmantes inspirations (1).

Les pièces de Jonson, Beaumont et Fletcher, Shirley, Dryden, sont de même mêlées de musique ; et il en fut ainsi jusqu'à la constitution du drame musical.

Il est annoncé par les Masques à la fin du seizième et au com- mencement du dix-septième siècle. C'est un genre qui se rappro- che déjà plus de l'opéra, que de la mascarade italienne. Les su- jets étaient empruntés à la mythologie, et prêtaient à beaucoup de mise en scène. Ils étaient tenus à une poésie courtisanesque, louant le roi et l'assemblée, ou chantant les époux , sous la figure de quelque divinité. Ce ne sont pas des actions dramatiques, mais des Festspiele , des spectacles d'apparat, dans le goût des ballets français. En général, ils n'ont pas de récitatifs. Pourtant, dans quelques masques , le dialogue était déclamé « in stilo recitativo. »

Le principal auteur de masques fut Jonson. La musique en était écrite par des Italiens. Les deux plus célèbres sont Alfonso Ferabosco (2) et Nicolo Lanière (3). Les masques restèrent long- temps un des amusements favoris de la cour. La reine Anne y joua, avec ses enfants et ses dames do compagnie. Sous Charles I er même, la reine Henriette-Marie y tint aussi un rôle. Une des plus

(1) Les musiciens anglais de l'époque ont écrit de nombreux madrigaux sur les pièces de Shakespeare. On pourra consulter sur ce point plusieurs livres anglais : Illustrations of Shakespeare, par Dance, 1876. — T. Oliphant, La Musa madrigalesca. Londres, 1837, in-12. — Bibliotheca madrigaliana. Rimbault, Londres, 1847, in-8°. — M. G. Chouquet a écrit deux articles à ce sujet dans la Gazette musicale (13 et 20 mai 1877).

La musique madrigalesque a fleuri en Angleterre, comme en Italie, jus- qu'au premier tiers du dix-septième siècle. Un des plus fameux composi- teurs de ce genre a été Orlando Gibbons, de Cambridge (1583-1025), orga- niste de la chapelle royale, et docteur en musique de l'Université d'Oxford. Sa musique d'église , et ses madrigaux à 5 voix avec accompagnement de violes, ont conservé encore une grande réputation en Angleterre.

(2) Alfonso Ferabosco (commencement du dix-septième siéclo) était un Italien né en Angleterre, et fils d'un madrigaliste éminent. 11 out une très grande vogue, et concevait de lui-mémo une haute opinion. Sa musiquo, disent les historiens anglais, est régulière au point do vue des modulations et de l'harmonie, mais rude et inexpressive, sans égard au rythme et au sens des vers.

(3) Nicolo Lanière, Italion, était musicien, peintre et graveur; il emploie en tout la mode italienne et le style récitatif. Il excelle dans le récitatif. On trouve do sa musique dans les collections Playfonl.

Ilawkins a reproduit dans son Histoire un portrait de Lanière, d'après lui-même.

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