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200 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

avec Trojano et Battista Scolari, une comédie qu'ils improvisèrent, et où Trojano tenait trois rôles (1).

Les représentations des jésuites débutaient en même temps, avec l'éclat de mise en scène qu'ils ont toujours eu l'habitude de donner à leurs cérémonies. La plus curieuse que nous connais- sions, est celle de 1597, pour la consécration d'une église à Mu- nich. Outre les acteurs, neuf cents chanteurs (choristes) y figu- raient, parmi lesquels Néron, Dioctétien, Decius, Maxence, etc., saints et papes avec leurs suites, personnages allégoriques, Satan et tout l'Enfer. Les spectateurs eurent grande épouvante en voyant Lucifer avec trois cents diables précipités dans les enfers par saint Michel. La musique, perdue, était de Georges Victoria, maître de chape^e des jésuites. Le scénario n'indique, d'ailleurs, que deux passages chantés (2). Ces représentations publiques (3) se perdi- dirent bientôt, et ne se continuèrent plus qu'à l'intérieur des couvents.

Cependant les souverains donnent à la musique une protection active; ils excitent les artistes à prendre part au mouvement con- temporain. L'empereur Rodolphe II donne des missions dans les Pays-Bas à ses meilleurs chanteurs. Le duc Wilhelm V (qui en- voie des secours à Palestrina abandonné) dirige ses musiciens vers l'Italie. Froberger recevra une pension de Ferdinand III, pour étudier sous Frescobaldi à Rome. Le landgrave Moritz de Marburg envoie à Venise le jeune Heinrich Schûtz, en se char- geant de tous les frais. Ainsi les idées modernes pénètrent en Allemagne, et l'opéra allemand commence en 1627 sa glorieuse carrière, en adoptant à son tour la Dafné de Rinuccini, traduite par Opitz, et mise en musique par Schûtz (4). Cette pièce, malheureusement perdue, reste isolée. La guerre de Trente ans est commencée, et ruine les arts en Allemagne.

(1) Roland do Lassus a écrit des madrigaux avec quelques phrases chan- tées par un personnage qui s'accompagne sur le luth. — Voir Massimo Tro- jano , Discorsi di tricmfi, gioslre , apparati, e délie cose più notabili fatte nelle nozze dell' illustriss. ed eccellcnt. signor Duca Guglielmonte. Munich, Adam Cerg, in-4o. 1568. On peut aussi consulter la notice sur Roland de Lassus, écrite par Samuel van Quickelberg, son ami : troisième partie des Prosopographiae heroum alque illustrium virorum totius Germaniae. Henr. Pantaléon, Bàle, 1566, in-4o.

(1) Acte I, scène 1. Chœur des anges, avec accompagnement d'instruments à cordes. — Acte IV, scène 7. Ecclesia pleure ses enfants. « On chante un lamento. »

(3) Celle de 1597 avait eu lieu devant l'église Saint-Michel, à Munich.

(4) Elle n'a jamais été imprimée; elle n'est même pas dans le catalogue des œuvres éditées de Schûtz, à la suite des Symphoniae sacrae de 1647.

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