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le théâtre nouveau

toute la comédie moderne, et la plus parisienne, et la plus mondaine : Capus, Meilhac, Porto-Riche, Veber, Tristan Bernard. Le nom même de Francis de Croisset ne nous est pas épargné. Parmi les œuvres plus populaires, Liberté de Maurice Pottecher, qui fut le premier spectacle ; les Mauvais bergers, l’Épidémie, le Portefeuille de Mirbeau, Blanchette de Brieux, la Cage et Tiers état de Descaves, la Nouvelle idole de Curel, et diverses pièces de Jean Jullien (le Maître) ; d’Ancey, de Marsolleau, de Trarieux, de Henri Dargel, de Jean Hugues (la Grève), et de Romain Rolland (les Loups). J’ai dit assez nettement mon opinion, au cours de cette étude, sur les dangers de cet éclectisme incohérent, pour n’avoir pas à y revenir. C’est pour l’élite même une nourriture fade, dont les esprits vigoureux répugnent à user ; et elle peut devenir mortelle pour un public ignorant et neuf, qui risque d’être submergé et étouffé par cet amas de sentiments et de styles contradictoires. Il n’en faut pas moins louer la généreuse vitalité de ce mouvement artistique. En trois ans, on a joué, dans la petite salle du faubourg Saint-Antoine, environ 200 pièces, dont une trentaine en 3, 4 et 5 actes, et quelques-unes inédites. Les acteurs n’ont pas fait défaut. Il s’est trouvé jusqu’à quatre troupes à la fois, recrutées dans le public de la Coopération, sans parler des divers groupes populaires qui lui ont prêté leur concours, et des élèves du Conservatoire qui, le 8 mars dernier, y jouaient Horace, avec mesdames Dudlay et Delvair de la Comédie française. Nous sommes donc en présence d’un Théâtre du Peuple en formation, absolument populaire, qui, sous l’active direction de M. Henri Dargel, se développe rapide-

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