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au delà du théâtre

sons sa vie publique, donnons-lui par des fêtes conscience de sa personnalité, glorifions la Vie.

Je ne parle pas seulement de ces solennités triomphales, où la Révolution voulait transfigurer ses propres actions, et dont la Belgique et la Suisse ont encore conservé, ou repris la tradition : la première, par ses puissantes manifestations politiques, d’où le souci de l’art n’est point absent,[1] — l’autre surtout, par ses fêtes dramatiques en plein air, où des milliers d’hommes prennent part, soutenus par l’orgueil et l’amour de la petite patrie : — représentations vraiment monumentales, qui sont peut-être à l’heure actuelle ce qui donne le mieux l’idée des spectacles antiques.[2]

  1. Par exemple, les manifestations du premier mai, à Bruxelles, à Gand, à Charleroi, en 1896, 97, 98. — Voir Jules Destrée, Les préoccupations intellectuelles, esthétiques et morales dans le parti ouvrier belge. — Mouvement Socialiste, 15 septembre 1902, et : Esthétique des cortèges. — Le Peuple, novembre 1901, — On sait d’ailleurs quel développement a pris en Belgique, depuis quelques années, l’Art public. — Voir à ce sujet les articles de Fiérens-Gevaert, en particulier dans la Revue de Paris du 15 novembre 1897.
  2. Ces fêtes, dont la tradition n’a jamais été interrompue en Suisse depuis des siècles, ont repris un développement et un éclat surprenant depuis une dizaine d’années. À l’occasion des anniversaires des grandes actions nationales, ou des centenaires de l’indépendance des cantons, chaque ville a rivalisé de faste et d’enthousiasme pour se glorifier elle-même en de pompeux spectacles ; et de cette émulation sont sorties des fêtes populaires, vraiment uniques. Parmi les plus belles, celle de Neuchâtel, pour le cinquantenaire de la République neuchâteloise (Neuchâtel Suisse, pièce historique en un prologue et douze tableaux, par Philippe Godet, intermèdes musicaux de Joseph Lauber, représentée à Neuchâtel, les 11, 12, 13, 14, 21 juillet 1898, par six cents acteurs et figurants et cinq cents chanteurs) ; — le Festdrama de Arnold Ott, représenté à Schaffhouse en 1900 ; — le Basler Bundesfeier, pièce historique en quatre actes de Rudolf Wackernagel, musique de Hans Huber, représentée à Bâle, en juillet 1901, par cinquante acteurs, quatre cents chanteurs et deux mille figurants ; — et cette année même, en juillet et août 1903, la Représentation du Val d’Anniviers, dans le Valais, par Marcel Guinand ; le Festspiel de Rhein-
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