Page:Rolland Clerambault.djvu/382

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

échange de mots, un bras qui se tend, un coup qui claque. Ils le virent chanceler et coururent. — Trop tard.

Ils l’étendirent sur un banc. Une foule, plus curieuse qu’émue, (on en avait tant vu ! on en avait tant lu !) se pressait, regardait :

— Qui est-ce ?

— Un Défaitiste.

— Ça va bien, alors. Ces salauds nous ont fait assez de mal !

— Il y a de plus grand mal que de souhaiter que la guerre finisse.

— Il n’y a qu’un moyen qu’elle finisse, c’est de la faire jusqu’au bout. Ce sont les pacifistes qui prolongent la guerre.

— Tu peux dire qu’ils l’ont causée. Sans eux, il n’y en aurait pas eu. Le Boche comptait sur eux…

Et Clerambault, dans une demi-conscience, pensait à la vieille femme, qui traînait son fagot au bûcher de Jean Huss… « Sancta simplicitas ! »

Vaucoux n’avait pas fui. Il s’était laissé prendre des mains le revolver. On lui tenait les bras. Il restait immobile et regardait sa victime, qui le regardait. Tous deux pensaient à leurs fils.

Moreau menaçait Vaucoux. Impassible, raidi dans sa foi haineuse, Vaucoux dit :

— J’ai tué l’ennemi.

Gillot, penché sur Clerambault, le vit faiblement sourire, en regardant Vaucoux :