Page:Rolland Clerambault.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bandeau ; il était blême, on voyait qu’il sortait de longs mois de maladie. Clerambault l’accosta amicalement et voulut prendre la lettre, que le jeune homme retira avec brusquerie, disant que ce n’était plus la peine. Clerambault l’invita à venir causer chez lui. L’autre hésitait ; et si Clerambault eût été plus fin, il eût remarqué que son visiteur cherchait à s’esquiver. Mais, un peu long à lire dans les pensées, il dit bonnement :

— C’est vrai que mon étage est un peu haut…

Piqué dans son amour-propre, l’autre répliqua aussitôt :

— Je suis encore capable de monter.

Et il s’engagea dans l’escalier.

Clerambault comprit qu’en plus des autres blessures, il en avait une au cœur qui était à vif.

Ils s’assirent dans le cabinet de travail sans feu. Comme la chambre, l’entretien fut lent à se dégeler. Clerambault n’obtenait de son interlocuteur que des réponses raides, brusques, pas très claires, et faites sur un ton qui semblait irrité. Il sut que l’autre s’appelait Julien Moreau, qu’il était étudiant à la Faculté des Lettres, et qu’il venait de passer trois mois au Val-de-Grâce. Il vivait seul, à Paris, dans une chambre du Quartier Latin, bien qu’il eût à Orléans sa mère, veuve, et quelque famille. Il ne dit pas d’abord pourquoi il ne les rejoignait pas.

Brusquement, après un silence, il se décida à parler. D’une voix étranglée, qui se faisait rude pour sortir, puis peu à peu s’adoucit, il dit à Clerambault le bien que lui avait fait la lecture de ses articles, apportés