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tageque le premier des musiciens. Il est la force la plus héroïque de l’art moderne. Il est le plus grand et le meilleur ami de ceux qui souffrent et qui luttent. Quand nous sommes attristés par les misères du monde, il est celui qui vient auprès de nous, comme il venait s’asseoir au piano d’une mère en deuil, et, sans une parole, consolait celle qui pleurait, au chant de sa plainte résignée. Et quand la fatigue nous prend de l’éternel combat inutilement livré contre la médiocrité des vices et des vertus, c’est un bien indicible de se retremper dans cet océan de volonté et de foi. Il se dégage de lui une contagion de vaillance, un bonheur de la lutte[1] l’ivresse d’une conscience qui sent en

  1. « Je suis heureux toutes les fois que je surmonte quelque chose. » (Lettre à l’Immortelle Aimée.) — « Je voudrais vivre mille fois la vie.... Je ne suis pas fait pour une vie tranquille. « (A Wegeler, 16 novembre 1801.)