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découragé, ou bien féroce à son tour. Il ne faut rien laisser au hasard.

Vous comprendrez peut-être maintenant que j’aie cru nécessaire de pousser mon cri d’alarme, pour réveiller les « Non-violents » trop quiets ! — Ajouterai-je que, depuis dix ans, une répugnance m’est peu à peu montée au cœur, en face de tels amis intellectuels français, que je voyais se contenter trop aisément de leur confortable attitude « non-violente », et protestant négligemment du bout des lèvres, par signatures au bout d’inoffensives adresses dans les journaux, sans compromettre rien de leur paisible situation bourgeoise ! — Bien qu’incapable, pour mon compte, de tremper mes mains dans la violence, combien l’attitude d’un Lénine, risquant sa vie et l’infamie ou les malédictions, pour arracher à leur enfer des millions d’opprimés, m’a paru — en face de celle des Pharisiens aux mains blanches — non seulement plus virile, mais même plus véritablement aimante et conforme à la loi intérieure du sacrifice pour le service de l’humanité ! S’il s’est trompé, ce n’est pas son cœur, c’est son esprit qui s’est trompé. Mais cet esprit se trouvait en face de l’action immédiate. Il fallait agir. Ne pas agir, c’était encore agir, (comme l’a démontré Krylenko aux milliers d’ouvriers de Pétrograd, dans les journées d’Octobre — voyez le beau livre de John Reed)[1] : car c’était laisser agir le pire. Ce que réclame l’heure présente, c’est le mot d’ordre pour l’action. Rassemblez-vous, pour le discuter ! Il faut d’abord le bien connaître et se mettre d’accord, pour le donner.


  1. « Dix jours qui ébranlèrent le monde. »