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La doctrine de foi et d’action de Gandhi est sainte. Et elle a démontré son efficacité dans l’Inde. Mais elle n’est pas un « Absolu ». (Lui-même ne le croit pas ; je vous rappelle ce qu’il a écrit du caractère toujours relatif de ses expériences, même de celles qui lui tiennent le plus au cœur.) Et l’Inde non plus n’est pas un « Absolu ». La grande question aujourd’hui pour nous tous, chercheurs sincères de la vérité, est de déterminer la valeur pratique, pour l’Europe, de l’expérimentation indienne.

Le fond de la foi demeure, pour moi, intangible. Il est : « AmourAmor Caritas », — non pas abstrait ou sentimental, mais actif, — l’action pour le bien des autres êtres, et l’apport de son être propre au service de la communauté. — L’Ahimsa[1] en est une des plus sublimes expressions. Et la Non-Acceptation de Gandhi, sa Résistance Civile organisée, en est actuellement la plus belle forme tactique, proposée à l’humanité.

Reste à savoir si elle répond aux exigences de l’action présente en Europe, et — d’une façon générale — dans tout pays qui ne s’y trouve pas adapté de nature, comme l’Inde, par des conditions spéciales de pensée religieuse et de vie sociale millénaire. Je pose ici la question, je ne préjuge pas des réponses.

Je voudrais qu’il fût possible qu’au prochain Congrès international de la Non-Résistance (ce mot déplorable, que je voudrais pouvoir effacer de nos cerveaux ! mais il y a laissé sa trace, même quand notre pensée proteste et crie tout le contraire : « Résistance de l’âme, jusqu’au bout ! » ), je voudrais qu’à ce Congrès il fût possible de faire intervenir Gandhi, et que le problème pût être dis-

  1. « Non-Violence ». Un des plus anciens principes de la religion hindoue.