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Runham Brown demandait :

1o Partagez-vous la manière de voir de A. Einstein, quand il dit que le refus d’accepter aucun service de guerre constitue un moyen pratique d’abolir la guerre ?

2o Trouvez-vous que les hommes qui personnellement refusent ce service devraient rencontrer l’appui de tous ceux qui désirent mettre fin à la guerre ?

Romain Rolland répondit à Runham Brown (20 février 1931) :

C’est pour moi une obligation de conscience de refuser toute participation à la guerre, directe ou indirecte. Et j’ai d’autant plus de raisons d’approuver cette déclaration du professeur A. Einstein, que j’y ai toujours conformé ma vie, particulièrement pendant la guerre de 1914-1918.

Mais si vous portez la question, du plan de devoir moral sur le plan de l’utilité pratique, je pense que la manière de voir du professeur Einstein est très contestable. La guerre ne sera point abolie, par le fait que « 2 % des habitants de la terre refuseront de se battre ». Le professeur Einstein ne me paraît pas considérer que la guerre a évolué depuis 1914 et qu’elle évoluera encore. Elle s’achemine vers l’emploi de petites armées de techniciens, sachant manier des flottilles aériennes, munies de torpilles à gaz, virus, et autres engins de destruction massive. Dans ces conditions, il serait fort indifférent aux gouvernements que 2 ou 10 % de leur population refusassent le service armé ; et ils n’auraient même pas à les emprisonner : combattants et non-combattants seraient également soumis à l’arrosage meurtrier.

Il faut le dire nettement, sans illusions : Point d’autre moyen pratique d’abolir la guerre, promptement, que