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spécialisation, une même éducation générale, spéculative et pratique, que je nommerai « panhumaniste », universellement humaine.

Ici, permettez-moi de vous soumettre une réserve, au sujet d’une des conclusions (la quatrième) adoptée, à votre Congrès fédéral de Lyon. Il est dit :

Le système général de l’enseignement devra tendre à développer chez l’enfant, jusqu’à leur extrême limite, les facultés intellectuelles, morales et physiques. Il devra armer l’homme, en vue de son rendement pour une production générale maximum.

Ces paroles me semblent l’expression d’une époque de combat, où les énergies sont tendues jusqu’à l’exaspération. Mais je crois qu’il y aurait quelque danger pour l’hygiène intellectuelle et morale, voire physiologique, de l’humanité, si l’on se proposait de la maintenir à ce point extrême de tension. L’humanité actuelle souffre beaucoup moins d’un manque de travail que d’une mauvaise répartition de ce travail, inégal et saccadé. Il en résulte un caractère fiévreux qui provient d’un déséquilibre entre ceux qui travaillent trop et ceux qui ne travaillent pas assez — déséquilibre entre les besoins normaux de l’homme et la surtension des énergies. Ce déséquilibre me paraît caractéristique de l’époque actuelle ; il est grave, car il livre au hasard de toutes les bourrasques de pensées et de passions, les âmes vibrantes et fatiguées ; j’en vois l’effet dans l’affolement général, le vertige des esprits européens, depuis juillet 1914. Il faut y remédier, en tâchant d’introduire dans l’enseignement, et, par lui, dans la vie, un idéal d’harmonie. Harmonie dans l’ensem-