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à qui nous osons prétendre, en les exploitant, que nous sommes venus apporter la civilisation, alors que tels d’entre eux ont une civilisation plus ancienne et plus haute que la nôtre. Notre intérêt éclairé, qui est d’accord avec la justice, nous enseigne que, dans le monde nouveau, prodigieusement grandi, où se réveillent les énergies d’immenses peuples, qui paraissaient endormis depuis des siècles, une France diminuée en nombre, et grande surtout par l’esprit, sera plus forte par l’amitié des peuples libres ou libérés par elle, dont elle aura reconnu, respecté et défendu les droits, que par le corset de fer de ses armées et de ses flottes, voire de ses alliances, incertaines, instables, dangereuses, que la poussée de l’avenir proche fera éclater.

Je réclame donc de vous — de nous tous — non pas une simple « volonté de paix », mais (« qui veut la fin, veut les moyens ») une volonté ferme et vigoureuse de coopération loyale, à ciel ouvert, avec les États d’Europe et du monde. Et pour commencer, il faut mettre fin aux agissements occultes de nos diplomates. Les démocraties d’aujourd’hui ont conservé les systèmes de gouvernement des anciennes autocraties : traités secrets, dictatures de fait assumées sans mandat par les premiers commis effrontés de nos Affaires étrangères, qui s’arrogent le droit de vendre leurs peuples, ainsi que ces principicules allemands du xviiie siècle qui vendaient leurs sujets, — en les engageant à leur insu, dans les futures coalitions, sur tous les champs de bataille de la terre, de la mer et des airs. Finissons-en avec ces crimes de droit public, qui sont des crimes de droit commun ! Ne tolérons plus ces trahisons ! Aux compères qui vous disent : « Le secret est indispensable en diplomatie », je réponds : « Oui, aussi longtemps que durera le système actuel d’impérialismes