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jean-jacques rousseau

louis d’argent, le manuscrit d’une petite comédie, et un système nouveau de notation musicale, dont il attendait gloire et fortune. Il s’est toujours cru plus musicien qu’écrivain ; et même après ses premiers succès de plume, il persistait, comiquement, dans son infatuation de génie musical, bien qu’il n’ait jamais été qu’un aimable mélodiste, de peu d’invention et d’encore moins de science.

Il commence par perdre son temps et son argent, en flânant dans les cafés et les salons. Mais ces flâneries ne lui sont pas inutiles : car il y fait la connaissance de Fontenelle, de Marivaux, de Condillac, et surtout de Diderot, qui devient son ami. Il y est aussi bien vu des femmes, qui procurent à ce jeune vagabond genevois, sans aucun titre, — par une chance, en vérité, scandaleuse (elle n’étonnait pas, en ce temps !) — la place de secrétaire de l’ambassade de France à Venise (mai 1743). Il en repart, brouillé avec l’ambassadeur, en août 1744. A Paris, il retrouve Diderot et l’appui de fastueux fermiers généraux ; il fait jouer de petites œuvres musicales et des remaniements de Voltaire et de Rameau. Il se met en ménage (1745), mais sans l’épouser[1], avec une jeune servante d’hôtel, Thérèse Le Vasseur, qui restera sa compagne jusqu’à sa mort. Il aura d’elle plu-

  1. Après vingt-cinq ans de vie commune, il finira par l’épouser.