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Gandhi de toute ambition personnelle, n’attendant que la victoire de sa cause pour se retirer de la scène et reprendre son labeur scientifique. Il fut, tant qu’il vécut, le chef incontesté de l’Inde. Que se serait-il passé, si une mort prématurée ne l’eût enlevé, en août 1920 ? Gandhi, qui s’inclinait devant la souveraineté de son génie, différait profondément de lui sur la méthode politique, et, sans doute, n’eût-il gardé, Tilak vivant, que la direction en quelque sorte religieuse du mouvement. Quel eût été l’élan des peuples de l’Inde, sous ce double commandement ! Rien n’aurait pu lui résister, car Tilak possédait la maîtrise de l’action, comme Gandhi des forces intérieures. Le sort en a décidé autrement : on a pu le regretter, pour l’Inde, et pour Gandhi lui-même. Le rôle de chef de la minorité, de l’élite morale, eût mieux répondu à sa nature et à ses secrets désirs. Il eût laissé volontiers à Tilak la direction de la majorité. Il n’a jamais eu la foi en la majorité. Cette foi, Tilak la possédait. Ce mathématicien d’action croyait au nombre. Il était démocrate-né. Il était, aussi, résolument politique, sans égards aux exigences