Page:Rolland - Mahatma Gandhi.djvu/212

Cette page a été validée par deux contributeurs.

decins ont beaucoup de peine à en préserver leur convalescent. Cet amour gagne jusqu’aux gardes qui le soignent, et aux Anglais mêmes : tel ce vieux retraité militaire de 82 ans, dont parle un journal anglais, et qui vient tous les deux jours à l’hôpital avec un bouquet de fleurs, entre sans qu’on puisse l’arrêter, serre chaleureusement la main au Mahatma, et s’en va, lui disant : « Allons, courage, mon vieux ! »

Lui, toujours paisible, maître de lui, s’obligeant à parler longuement aux visiteurs. Il est émacié, ratatiné : « Il semble à peine la moitié de lui-même… On a les larmes aux yeux en le voyant. » Mais qui l’entend parler, de sa voix douce et calme, avec son affectueuse courtoisie, est touché jusqu’au cœur de sa sérénité. Et qui, l’ayant déjà connu avant son emprisonnement, le revoit (comme ce jeune Parsi qui me racontait, ces jours derniers, sa visite à l’hôpital), est frappé du changement. Avant la prison, on le sentait, malgré sa force d’âme, attristé de soucis. Maintenant, il est toute lumière… « Une âme qui peut se dire vraiment en paix avec le monde[1]. »

  1. Dilip Kumar Roy — Combien j’aimerais à citer ici l’entretien que notre ami, le musicien hindou, D. K. Roy,