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déterminé ; mais, Tilak mort, l’Inde était sans chef politique ; il fallait le remplacer.

« Si je parais prendre part à la politique, dit-il expressément au moment où il s’y décide, c’est seulement parce que la politique nous enserre aujourd’hui, comme dans ses replis un serpent : on ne peut s’en dégager, quoi qu’on fasse. Je veux donc lutter avec le serpent… J’essaie d’introduire la religion dans la politique. »[1]

Mais Tagore déplorait cette nécessité. Il écrivait, le 7 septembre 1920 :

« Toute la ferveur morale que représente la vie de Mahâtmâ Gandhi, et que lui seul, entre tous les hommes du monde, peut représenter, nous est nécessaire. Qu’un trésor aussi précieux soit mis sur le frêle vaisseau de notre politique et lancé sur les flots sans fin des récriminations irritées est un grave malheur pour notre pays, dont la mission est de redonner la vie aux morts par le feu de l’âme… Le gaspillage de nos ressources spirituelles dans des aventures qui, du point de vue de la vérité morale, sont mauvaises, est navrant. Il est criminel de transformer la force morale en force aveugle. »[2]

Ces lignes lui étaient dictées par les débuts retentissants de la campagne de Non-coopé-

  1. 12 mai 1920.
  2. Et plus tard : « Tout honneur au Mahâtmâ ! Mais nos politiciens ne peuvent se défaire de l’idée de l’utiliser pour une manœuvre secrète et ingénieuse dans leur jeu, sur l’échiquier. » (1er octobre 1921).