Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/67

Cette page n’a pas encore été corrigée

Le poil de son corps se hérissait. L’échiné glacée, elle se raidit :

— « Assez ! Ceux qui te renseignent n’ont pas volé leur pâtée. Ne compte pas que j’en mangerai ! Si je suis une chienne, je suis une chienne maigre, je le resterai. »

— « Ce sont les meilleures », dit-il. « Je ne compte pas que tu changeras. Sois seulement ce que tu es ! Mais ose l’être ! Sois-le franchement ! Tu n’es pas de ceux qui peuvent se contenter de se balancer indéfiniment entre le pour et le contre, comme les danseurs de corde de Paris… »

Il ajouta :

— « Comme ton mari. »

Elle se rebiffa sous le coup brusque :

— « Je te défends de parler de lui. »

Elle avait l’air d’une chatte en boule, qui va lui sauter aux yeux.

— « Je n’ai pas besoin d’en parler », dit-il. « Tu en penses juste autant que moi. »

— « Ce n’est pas vrai ! » dit-elle. « Tu n’es pas digne d’attacher les cordons de ses souliers. »

Il goguenarda :

— « C’est un honneur que je te laisse. Mais j’ai idée que ses souliers sont mal attachés, »

— « Tu espionnes aussi ma chambre à coucher ? »

Il avait fini de fumer. Il prit un bras de Assia dans son étau, et d’un ton bonhomme, mais sérieux, il dit :

— « Mon petit, assez joué ! Parlons sans pique ! Tout ce qui peut nous être utile, nous avons le droit (ou nous le prenons) de l’observer. Mais il n’y a pas besoin de lunettes pour voir que toi et lui, vous n’êtes pas faits pour traîner la même charrette… Laisse-moi parler !… Je ne dis point de mal de ton limonier. Il a ou il peut avoir toutes les vertus. Mais ces vertus ne