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— « Ça m’est égal. La Révolution, n’est-ce pas ? il faudra la faire dans tout le monde. »

— « Et on finira par la France, bonne dernière ? La pauvre vieille !… En voilà un fou !… C’est ta maman qui t’a peint en rouge ? »

— « Oh ! toi aussi ! »

— « Moi ? Moi, je suis rouge ? »

— « Tu l’es, dedans. »

— « Tu en as un regard de furet ! Qu’est-ce qui te permet de regarder dedans ? »

— « Moi, je me permets. C’est amusant. »

— « Ah ! je t’amuse ? Nous t’amusons ? Tu trouves que la vie est amusante ? »

— « Oh ! c’est tordant ! »

— « Alors, pourquoi diable parles-tu de mourir ? »

— « Non, pas mourir. Me faire tuer. »

— « C’est la même chose. »

— « Non. Tu sais bien ! »

— « Je ne sais rien. »

— « Tu sais. Mourir, c’est quand on attend, c’est assommant. Mais se faire tuer, c’est intéressant. »

— « Le jeu est sérieux. »

— « Plus c’est sérieux, plus c’est amusant. »

— « Le carpillon en remontre à la carpe. Tu dis juste. »

— « Tu n’es pas la carpe. Tu es la truite. »

— « Pourquoi ? »

— a C’est vrai qu’elle remonte les ruisseaux ? »

— « C’est vrai. »

— « Et quand il y a un barrage, qu’elle saute par dessus ? » — « On le dit. »

— a Tu en as sauté ? »

— « Ah ! diable, oui ! »

— « Quand tu sautais, j’étais dans ton ventre. »