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soucis laissés, sans qu’aucun n’y manquât ! D’ici là, jouir des jours, sans penser ! Faire l’enfant… Il en avait eu si peu le temps, dans sa vie de peines précoces et harassantes ! Vite, rattrapons le temps perdu !

Jean-Casimir qui, de passage, lui fit visite, la veille du départ, trouva un Marc heureux, comme il ne l’avait jamais vu. Quand il apprit le voyage, il manifesta son approbation, qu’on ne lui demandait pas, avec un contentement qui étonna. Marc et Assia lui en demandèrent les raisons. Il ne s’expliqua point ; mais il dit :

— « Quelle bonne idée ! C’est mieux pour toi, qu’on t’oublie. »

Assia le prit à part et l’interrogea :

— « Qu’est-ce que vous savez ? Y avait-il donc pour lui quelque danger ? »

— « Vous devez bien penser », dit Jean-Casimir, la fixant, « que le métier que vous lui faites faire, n’est pas de tout repos ! »

Assia se rebiffa :

— « Que je lui fais faire ? Il fait ce qu’il veut. Il fait ce qu’il doit. Et je fais ce que je dois. »

— « Si vous voulez ! Je ne discute pas l’ordre des facteurs. Le résultat ne change pas. »

Assia, s’obligeant à ne pas poursuivre la passe d’armes, à laquelle elle était disposée, — (Dieu ! que ce Casimir l’agaçait !) — pour savoir de lui ce qu’il savait, prit son sourire le plus enjôleur :

— « Alors, selon vous, pour Marc, Paris n’est pas très sûr, en ce moment ? »

— « Pas seulement Paris. Faites attention ! »

Il avait laissé son ironie. Assia la reprit, pour réagir.

— « Ils sont trop pleutres !… Quinze jours d’absence. On a vite oublié, à Paris. »

— « Les livres de comptes n’oublient pas. Doit et avoir. Tout est inscrit. »