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fût lancé à la gorge de l’assaillant. Le coup dévia, le bout de la canne seule cingla la joue et l’entama. Mais le jeune tigre, entraîné par son bond, entraîna l’autre, au cou de qui ses griffes s’enfonçaient, et dégringola, au bas de l’estrade. Le choc de la chute fut terrible pour l’homme qui se trouvait dessous. Il avait frappé le plancher de la nuque. Et dessus lui, cet enragé, fou à son tour, qui ne desserrait point ses griffes mortelles. Une brume de sang noyait ses yeux ; et son cerveau et son esprit baignaient dans le sang. Il voulait le sang. Sa mâchoire claquait. Il eût lacéré, avec ses dents, l’ennemi. Et il ne s’apercevait pas que l’homme sous lui avait perdu connaissance. On eut de la peine à le dégrafer du corps inerte, qu’il broyait. Alors, seulement, il vit la face livide qui lui ressemblait. Et la bouche ouverte, il se figea. Mais ce ne fut qu’un instant. La frénésie du combat rugissait encore en lui ; et autour de lui, la mêlée était sauvage. Le front baissé, comme pour s’élancer de nouveau, il suivit, d’un regard impitoyable, l’homme brisé qu’on emportait, et il pensait :

— « Le crever, une seconde fois !… »

Auprès de lui, étaient descendus Julien, qui tâchait de l’apaiser, et Assia, la joue en sang et tuméfiée. Il n’entendait pas ce qu’ils disaient. Et brusquement, ce fut la nuit ; l’électricité s’éteignit ; la salle fut une gueule d’ombre, aboyante ; et, trouant le tas, trois ou quatre coups de revolver. Pris aux deux bras par deux mains fermes, Marc se laissa entraîner à l’aveuglette, hors de la salle ; et à son oreille, riait nerveusement Assia. Avant d’avoir eu le temps de se reconnaître, il était dehors, encadré par un groupe de ses partisans, et emballé dans un taxi, avec Julien et Assia…

Alors, vint la détente nerveuse, un frisson convulsif