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Pour le moment, le danger restait lointain. L’action de Marc paraissait encore inoffensive pour le pays qui l’abritait. Elle gardait un caractère généreux et général, dont l’hypocrisie d’un État démocratique pouvait habilement s’accommoder. Il s’agissait surtout alors pour Marc et pour son groupe, de défendre les droits des opprimés, des exilés de toute l’Europe, d’être ou de créer autour de soi un bastion des libertés contre la Réaction universelle. La France, favorisée par la victoire, qui lui assurait, pour quelques années encore, dans la misère et dans la fièvre du reste du continent, une économie privilégiée, pouvait se permettre ce luxe d’une liberté idéologique, qui ne lui coûtait guère. Même sa politique d’impérialisme capitaliste trouvait en cette opposition une justification aux yeux de l’Europe, et pour ses ruses un paravent, à l’ombre duquel on réchauffait l’équivoque d’une démocratie aux joues gonflées de nobles principes, qui, en sous-main, soudoyait les fascismes de la Yougoslavie, de la Pologne et des Balkans, et sur son sol même entretenait des prétoriens, des gardes-blancs. — Marc et ses amis ne commencèrent à devenir gênants que du moment où ils s’attaquèrent à ce mensonge. Mais on s’arrangeait de façon que leurs incartades eussent