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comme un moyen de gouvernement ; ils en avaient impartialement dans tous les camps de l’opposition, à gauche, à droite, — parmi le parti de la Révolution, comme chez ces Messieurs du Roy. L’appareil de police politique avait formidablement grandi en quinze années. À l’exemple de l’Intelligence Service, elle aspirait à devenir un État dans l’État. On pouvait déjà prévoir le temps où, pour se maintenir, le premier-ministre devrait se faire le premier flic de l’État, (ou le second : le sous-Chiappe). Il ne restait plus à la liberté qu’une heure de souffle, avant qu’on lui tordît le cou. Faisons comme Marc, profitons de l’heure !

Marc risqua, plus d’une fois, par ses attaques, le passage à tabac, et même l’attentat, — la nuit, revenant, au coin d’une porte l’assommade par des rôdeurs patentés. — Mais ils avaient compté sans le revolver de Assia, qui les devança, claqua dans le tas : le blessé ne tint pas à se faire connaître. Et, par la suite, sans que Marc ni Annette en eussent vent, Sylvie entra en scène.

Assia l’avait avertie : les deux femmes, qui ne s’aimaient pas, scellèrent l’entente, pour la défense de leur petit, Sylvie avait des amitiés dans tous les mondes ; elle en avait dans la presse, et au Parlement ; elle y jouissait de ces privilèges qui, à Paris, sont reconnus à certaines vedettes féminines de la mode, de la vie galante, et de l’esprit, — surtout à mesure qu’elles deviennent blettes : pour le nez des Parisiens, les femmes en renom prennent, avec l’âge, comme le vin, plus de bouquet. Sylvie usa de cette primauté et de sa langue bien affilée, pour faire savoir à ces messieurs de la Tour Pointue qu’ils eussent à s’abstenir de coups de main sur son neveu : champ réservé, gare au scandale ! La Ligue des Droits de l’Homme fut alertée. Et