devant le désastre accompli. Toutes les forces qui lui restaient n’étaient pas de trop pour dissimuler à l’autre les ruines. Elles ne suffisaient pas. Assia, avertie par sa propre expérience, flairait les ruines…
Ils passèrent par là, tour à tour. Jamais ensemble. Cela durait, parfois des heures, parfois des jours. Il semblait qu’en se répétant, le phénomène eût tendance à se prolonger : il n’avait plus la violence du premier coup ; il n’en était que plus morne et plus accablant. Il enlevait le goût de vivre. Jamais ils n’eurent l’énergie de se faire part de ces assauts. Ils se les cachaient comme un mal honteux. Et dans le silence, le mal devenait chronique ; il s’installait. La seule qui eût pu les instruire, Annette, était par eux tenue à l’écart ; et elle prenait garde de s’immiscer dans leur ménage ; elle connaissait l’humeur ombrageuse de sa belle-fille, elle ne pouvait gagner sa confiance qu’en ne la cherchant point. Elle était d’ailleurs dupée par eux. Après avoir prévu et attendu les inévitables baisses de température qui suivent les trop hautes pressions, maintenant que la dépression s’était produite, elle ne s’en apercevait point : car ses enfants s’entendaient pour la lui cacher. Jamais leur ménage n’avait paru plus uni aux yeux des autres qu’en ces jours où leur amour tremblait sur ses bases. Puisqu’ils avaient honte d’avouer ce qui leur paraissait une infirmité : un mal sans causes !
L’un et l’autre pourtant n’étaient pas novices en amour ; ils avaient déjà goûté à la satiété. Mais aucune de leurs expériences antérieures n’avait eu l’intensité de celle-ci. Ce n’était point, jusqu’à ces jours, l’amour vrai qui était engagé, mais bien plutôt le jeune désir qui part en chasse, la joie du jeu, rien de malsain, mais rien de profond, l’insouciance de la nature qui s’essaie et qui se trompe allègrement : — elle a le temps ! — Ou