courtes jambes flageolantes, tête sur cul : pensée assise. Il répondait :
— « Eh ! que pourrais-je ? Que pourrait-on ? Je ne suis pas Einstein, ou Langevin. Eux-mêmes, à quoi servent leurs protestations ? Ils feraient mieux de rester dans la science. Chaque heure qu’ils perdent hors de la science, rien ne la compense. La science est notre maison. Il faut rester dans sa maison. »
— « Balaie au moins devant ta maison, comme disait l’homme de Weimar ! »
— « Non ! Tu me vois balayant la rue ? J’ai assez à faire de tenir propres mes instruments d’opérations et de vérifier mes pesées. Que chacun fasse son métier ! Si chacun le faisait, le monde n’en irait pas plus mal. »
— « Les requins le font. »
— « Aussi, les petits poissons. »
— « Et tu le trouves bien ? »
— « Le monde est ainsi. Je ne l’ai pas fait. Ce n’est pas nous qui le changerons. »
— « Tu l’empires. Ta science est au service des requins. Toutes vos recherches sont immédiatement captées pour la tuerie. Tu es le complice des assassins. T’inquiètes-tu que tes études des dérivés organiques nitrés et de l’effet sur eux des radiations servent à élucider la question de la stabilité et de la conservation des poudres de guerre ? Tous les matériaux nécessaires à la destruction pour ses explosifs, ses gaz asphyxiants, ses ypérites, ses tolites, ses mélinites, ses phosgènes, et ses arsines, c’est vous, crétins de génie, qui les lui fournissez. »
— « Les mêmes produits qui peuvent détruire, peuvent guérir ou servir l’homme. Fabriques de teintures ou de parfums, ou de produits pharmaceutiques. Ce n’est pas notre faute, si le mal et le bien sont les deux faces de la même monnaie. C’est un fait. Nous