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Assia fit un geste d’indifférence. Cette passionnée n’avait pas le temps de se souvenir maintenant du petit. Elle dit :

— « Il est à vous. Naturellement, vous le prenez. »

— « Assia ! » s’exclama Annette, « l’aimes-tu si peu que tu n’en réclames plus ta part ? »

Le cœur de Assia se rouvrit. Elle revit le petit, et subitement, elle en fut affamée. Ses yeux flambèrent. Elle tendit ses mains frémissantes :

— « Donnez-le moi ! Je le veux ! »

Mais presque aussitôt, les larmes lui montèrent aux yeux, et ses bras retombèrent, découragés :

— « Qu’est-ce que j’en ferais ici ? Non, gardez-le ! Vous êtes mieux faite pour l’élever. »

Annette demanda :

— « Tu es décidée à ne plus rentrer à ta maison ? »

Assia cria :

— « Jamais ! »

Toute sa rancune contre Marc se redressait, comme un serpent sur sa queue. Elle dardait un regard haineux. Annette eut mal ; mais elle pensa :

— « Que lui a-t-il donc fait ? »

Assia sentit que son dard, pour toucher Marc, avait traversé le cœur de la mère. Elle en éteignit la pointe enflammée. Et, d’une âpreté plus émoussée, elle dit :

— « Je n’ai plus de maison. Rien de ce qui est là-bas n’est plus mien. »

— « Il te plaît d’oublier, » dit Annette, « mais je n’oublie pas que la moitié de ce qui est là-bas est tien. »

— « Je n’avais rien quand je suis entrée. Quand je ressors, je ne reprends rien. »

— « Je n’admets point », dit Annette, « si tu t’en vas, que Marc te laisse, sans subvenir à tes besoins. »

— « En premier lieu », riposta-t-elle, se raidissant sur ses ergots, pour ne point perdre un pouce de sa