— « Je vivrai. »
— « Quoi ! Sans agir ? Sans même écrire ? »
— « Je n’ai plus aucune ambition. »
— « Est-ce encore vivre ? »
— « Justement ! C’est là, vivre… »
— « Explique !… »
— « Cela ne s’explique pas. »
— « Et c’est tout ce que tu rapportes de là-bas ? »
— « Assez pour moi ! S’il vous faut davantage, il faudra que vous alliez l’y chercher. Moi, j’ai payé. »
Lorsqu’il partit, les Sept se regardèrent, blêmes, rouges, furieux, atterrés. Bouchard disait, roulant les yeux :
— « Les salauds ! La guerre nous a châtré nos taureaux. »
Quant à ceux très rares qui, pendant la guerre, avaient tenu contre la guerre, à ceux qui avaient porté au-dessus de la mêlée l’étendard de leur opinion, et que les maîtres de la guerre avaient su diaboliquement flétrir de l’épithète de « Défaitistes », — même les plus libres de ces jeunes gens qui savaient l’inanité de cette injure gardaient la peur de paraître la mériter, — et, peut-être, un certain mépris caché pour ceux qui n’avaient point craint de s’y exposer. Il eût fallu que ceux-ci eussent l’audace insolente de s’en parer, comme d’une gloire, dans un geste de défi et de bataille, ainsi qu’avaient fait les « gueux » de Hollande et que faisaient à cette heure les bolcheviks de Russie. Mais leur faiblesse était d’être trop sages et de se refuser aux violences de la pensée, à ses excès. — Or, l’excès était la température normale de tous ces jeunes hommes d’après-guerre. Et Non-violence équivalait à non-sens, aux yeux de tout l’Occident, intoxiqué de l’esprit de guerre, que n’avait pas encore touché la lueur du Christ des Indes. Être viril, pour ces jeunes gens, était « violer » — était a violence ».
Eux, les farauds, qui se targuaient de « n’être point