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était de garder. Marc, peu attiré par le snobisme neurasthénique de l’androgyne aux yeux de velours franco-sémite, ou par le dévergondage paralytique de l’Irlandais, était plutôt livré à la contagion du mal du moi décomposé, chez le Sicilien halluciné Pirandello : car la décomposition s’accompagne là d’une violence explosive, qui se lie à l’acte et le déclenche. Son tempérament y était apparenté. Mais ce délire mental — inoffensif chez l’écrivain qui s’en décharge, (surtout quand il est déjà parvenu à la maturité), — a des répercussions dans un corps de jeune homme à peine formé, fiévreux, miné, épuisé de fatigues, de jeûnes et de tourments, qui risquent de le tuer.

Le brave petit luttait de son mieux, sans crier grâce, sans demander aide. À bout de souffle, crispé des poings, penché de tout l’avant-corps sur l’abîme, il assistait à cette terrible dissolution d’un monde dans la fosse, il aspirait ces pourritures qui s’exhalaient du cadavre d’une civilisation — près de tomber d’horreur sacrée et d’asphyxie, — mais transpercé par les coups de feu de violentes fusées, — il attendait, il appelait, avec une foi aveugle et enragée, que de la bouche du cadavre surgît la tige droite et verte, porte-graine de la vie nouvelle, du nouveau monde qui allait venir. Car il viendrait ! Il faut qu’il vienne…

— « Je sens sa brûlure dans mes reins. Je meurs, ou je le sème ! Même si je meurs, je le sème. Il jaillira !.. Il est — je suis, vivant ou mort, le flot de substance, le flot d’esprit, qui se renouvelle, l’éternel Renaissant »