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un Brie bien gras, et un vieux Beaune. Ses yeux brillaient de malice et le narguaient. Il n’eût pas fallu la défier ! Marc se laissait faire, résigné — bien satisfait — la conscience muette et engourdie, comme un chien de garde qu’on a repu. C’était bon de manger, une fois, à sa faim !

Quand ils ressortirent, Marc devait se rendre à son travail. Ruche lui dit :

— « Donne-moi ta clef ! »

Il la retrouva, le soir, installée dans sa chambre, au milieu de ses chemises et de ses chaussettes, qu’elle reprisait. Tous ses tiroirs et sa malle étaient vidés. Papiers, effets, encombraient le lit, les deux chaises, et le parquet. Et tout n’était pas propre, il s’en fallait ! Marc jetait son linge sale, dans le recoin d’un placard. Ruche avait tout sorti, rangé, compté, examiné, et même, elle avait fait dans la cuvette un blanchissage. Devant la fenêtre, sur une corde, des flanelles et des mouchoirs s’égouttaient.

Marc aurait voulu rentrer sous terre. Rien ne lui était plus sensible que de laisser voir ses misères de corps et ses hontes sous-vestimentaires. Il s’affaissa sur le lit, cachant sous sa main ses yeux. Il répétait, d’un ton plaintif :

— « Ah ! non, non, non !… »

La voix de Ruche, avec bonhomie, dit :

— « Allons, allons !… Est-ce que ça n’est pas tout naturel ?… »

Il gémit :

— « Toutes ces guenilles… »

— « Précisément. Elles avaient grand besoin de mes doigts. »

— « Non ! Les salir dans ces ordures ! »

— « Si tu crois qu’ils n’ont pas l’habitude ! Quand on est femme, on en voit d’autres ! »

— « Ça n’est pas bien ! Non, non ! Tu n’avais pas le droit… »