Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 5.djvu/272

Cette page n’a pas encore été corrigée


L’instruction ne traîna point. Le fait était clair. Il n’y avait rien à démentir, et l’accusé ne démentait rien. Jean-Casimir revint de Prague, encore une fois, pour les assises. Bien que leur intervention dût être vaine, les deux amis s’étaient fait un point d’honneur de comparaître, comme témoins. Devoir pénible pour Marc. Il lui était insupportable de s’exhiber en public ; il savait qu’il s’y montrait toujours inférieur à lui-même : la sauvagerie, l’orgueil le paralysaient. Et la pensée de se retrouver face à face, dans la lumière du sinistre spectacle, avec l’ancien compagnon, d’affronter peut-être ses invectives et ses reproches, lui faisait peur. Il eût voulu fuir, ou, comme un enfant, se boucher les yeux et les oreilles, jusqu’à ce que « ce fût fini »… Mais plus il avait peur, plus il était brave : car il s’enrageait contre lui. — « Marche, poltron ! » — Il marcha.

Tout était trouble autour de lui, il ne vit rien, il ne retint rien de son entrée, au Palais bruissant, dans la salle des témoins. Jean-Casimir, très à son aise, le guidait, échangeait avec l’un, avec l’autre, un salut ou un mot plaisant. Il n’était pourtant pas beaucoup plus tranquille que Marc sur sa rencontre avec Bouchard. Leur tour vint assez tôt. Les témoins à décharge n’étaient pas nombreux. Quand il fut introduit dans la ruche à mort, Marc, raidissant ses jambes qui lui paraissaient rembourrées de son, serrait les dents, se