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s’ingénia, avec elle, à reconstruire l’histoire. Sylvie lui raconta, pour la première fois, ce qu’elle avait appris des raisons qui amenèrent la révocation d’Annette, de la scène du cimetière, et de l’intérêt qu’elle portait à un prisonnier. Sur ces données, Marc longuement travailla. Et la figure de sa mère lui apparut sous une autre lumière. Il revisa ses idées. Le pacifisme qu’il méprisait comme fade, bon pour les femmes et pour les « ramollis », — en devenant une passion, en se faisant dangereux, prit de la saveur. Il imagina une aventure d’héroïsme et d’amour, un roman ; il en ressentit une jalousie cuisante et un attrait inquiet. Maintenant, il comprenait le soupçon de sa mère, qui l’avait tant blessé ! Et le pire était qu’après s’en être indigné jusqu’à la rage, il dut reconnaître que ce soupçon, il l’avait, par son attitude, autorisé. C’était accablant… Mais il ne s’agissait plus de lui. Sa mère était en danger. Et quand il la vit entrer, il n’eut pas un instant de doute qu’elle ne vînt sciemment au devant du danger. Cette pensée prima en lui toutes les autres. Il la couvait des yeux. Il la suppliait mentalement de lui confier ses risques. Mais il savait bien qu’elle ne le ferait pas. Il en souffrait,