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qu’elle se consacrât à tout ce qui était lui : — aussi bien son chagrin, son deuil, son désarroi, que son corps, sa santé, son manger, son logement, son vêtement. Nourrice et nurse, confidente et servante à tout faire, il ne lui fallait rien de plus, elle ne lui était rien de plus ; et il semblait attendre d’elle les soins et les services qui étaient de son métier. Annette, comme lui, le trouvait naturel. Il ne la remerciait qu’à peine, par politesse. C’était elle qui le remerciait, tacitement, d’avoir besoin d’elle.

Son égoïsme la ravissait. Il en est de charmants ; et les femmes ont pour eux une prédilection. Un homme qui vous aime, pour vous, — on lui en sait gré. Mais un homme qui vous aime, pour lui, — comme on le chérit ! Il ne pense qu’à lui, il ne se donne pas, il vous prend, il vous gruge, et il vous trouve bonne…

— « Qu’il est bon ! » dit cette huître…

Franz mangeait Annette, le plus gentiment du monde. Il était tendre et câlin, séduisant, en toute innocence ; il se laissait plaindre et choyer ; il lui faisait la grâce de lui exprimer des vœux qu’elle se hâtait d’accomplir, — quand elle ne les devançait pas, — descendant et remontant l’escalier