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ter, et combien il en avait abusé. Il la pria de lui pardonner. Elle dit :

— Vous ne savez pas comme c’est bon qu’un ami abuse !… Ce qui nous tue, c’est que qui nous aimons n’use pas de nous !…

Elle pensait à son fils. Mais jusqu’à cette heure, elle n’avait jamais parlé de lui à Germain ; et jamais il ne s’en était soucié. Ce fut en ces derniers jours que, se dépouillant, morceau par morceau, de sa peine, avec sa vie, il songea enfin à connaître la peine que gardait pour soi l’amie.

Il l’avait maintenant de veille, presque toutes les nuits. Bien qu’on eût rappelé par dépêche sa sœur, il ne voulait nulle autre qu’Annette. Il abusait encore ; mais, pour se tranquilliser, il se disait qu’il n’en aurait plus pour longtemps. Et puisqu’Annette était heureuse qu’on abusât ! … Mais il savait qu’un cœur généreux est fait pour qu’on l’exploite, et il s’inquiétait des peines au devant de qui elle marchait.

Il parlait moins de lui. Il avait d’ailleurs plus de peine à parler. Il la faisait parler. Il voulait connaître sa vie cachée. Et maintenant qu’il allait mourir, elle n’avait plus rien à lui cacher. Elle lui raconta tout, sobrement, avec une émotion voilée.