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calmé. Puis, tous deux, tendrement, se rapprochèrent d’Annette ; et Marc, serré contre elle, la mena à petits pas vers la porte-fenêtre, et l’assit sur la margelle du balcon, et s’assit auprès d’elle. Et Sylvie, à leurs pieds, les jambes ramassées sous elle, comme un Bouddha, les regardant, souriait.


Ils sont assis, tous trois, sur un monde en ruines.

Annette, les yeux fermés, écoute les cloches, les cris, les chants de la rue, elle sent contre sa joue la joue de son garçon… Elle rêve… Le cauchemar est fini. Le cauchemar de la menace qui pesait sur cette tête chérie, et celui de la souffrance humaine qui pesait sur son cœur : l’épreuve monstrueuse, la guerre est terminée… Elle n’est pas encore sûre. Timidement, elle rapprend le goût de l’air. Elle respire…

Marc aussi est allégé. Il n’avait point de joie à voir la menace approcher. Il n’aurait, par fierté, rien fait pour l’éviter. Mais il n’était point sûr de ses forces et de sa foi. Il entend hurler et rire cette foule incohérente. Il sait bien que l’épreuve n’est qu’ajournée… Mais quelques années gagnées, à son âge, c’est un monde ! Il savoure le répit. Il goûte la vie à venir. Il rêve…