matériel d’idées, ou, plus exactement, son répertoire de mots, — sans beaucoup apprendre du fond, car il était trop occupé à parler, pour avoir le temps d’écouter. Mais il parlait très bien. Sur un point cependant, ses connaissances s’étaient sérieusement étendues : sur l’élève du bétail électoral et sur son exploitation. Là-dessus, ils étaient quelques-uns parmi les hommes d’État de la Troisième République, qui étaient passés maîtres ; ils possédaient sur le bout des doigts le clavier des masses, ils avaient le secret des touches : faiblesses, passions, manies. Mais nul n’en savait jouer en virtuose plus accompli, nul ne faisait vibrer avec de plus somptueuses sonorités les accords souverains de la démocratie, les idéologies à la gueule d’airain, qui couvrent, évoquent et surexcitent les vertus de la race et ses vices cachés, que l’honorable Brissot. Il était le grand pianiste du Parlement. Son parti — ses partis (puisqu’il se laissait réclamer par plus d’un) — faisaient, à toute occasion, appel à ses talents pour les concerts de la Chambre, les discours retentissants, dont la musique, sur les grandes affiches blanches (votées par acclamations, aux frais de l’électeur), faisait le tour de
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