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voir. J’ai appris de toi des choses que tu ne m’avais pas dites (tu ne m’as pas dit grand chose !) et que ma tante m’a dites. Et j’en ai appris d’autres, que ma tante ne m’a pas dites, parce qu’elle ne s’en doute pas : c’est une bonne femme, qui ne peut pas les comprendre… Mais moi, je les comprends… (Je crois… Non ! Je suis sûr…) Et cela m’a fait comprendre beaucoup de choses de moi-même, que je ne m’expliquais pas… Ah ! comme tout est confus, tout ce que je t’écris !… »

(Sa plume, de dépit, s’embourbait et crevait le papier.)

« …Comme il est difficile de s’exprimer, de loin, de près ! On a la langue nouée. Il me semble que je m’expliquerais mieux, si je t’avais devant moi… Et encore, non ! Je ne sais pas… Tes yeux, quand tu me regardes, indulgents, protecteurs ou moqueurs (les deux m’enragent autant), ou distraits, ou lointains… Tu regardes ailleurs… Regarde-moi, dans le cœur, droit au fond, comme ton fils, ton ami, comme un homme !… »

Annette voyait ce regard qui la fixait, exigeant et sévère. Et elle détournait les yeux, intimidée… Son fils, un homme !… Elle n’y avait pas songé.