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Combien pire que de ne plus croire à l’humanité !… Une foi perdue, l’âme vigoureuse en refait une autre, elle rebâtit son nid. Mais quand c’est l’âme elle-même qui vous manque !… Elle était de sable, elle s’éboulait… Dans sa sincérité passionnée, l’intransigeante Annette se marquait, au front, de mensonge. L’humanité remplissait sa bouche ; mais sous sa toile, l’araignée, le cœur avide, guettait sa proie. L’humanité, pour elle, c’était l’homme… L’homme… ce premier-venu, aimable et insignifiant ! … Quel ridicule !… En avait-elle dépensé, des élans de foi et de dévouement — et tous ces risques : les siens et ceux des autres, entraînés à sa suite — pour se faire prendre à l’hameçon ! Cet enthousiasme de sacrifice, pour cette amorce, pour ce garçon — (lui ou un autre ! le hasard l’a pris pour esche !) — et on le pare comme une idole, et on habille son désir, pour que le plaisir soit complet, avec ces oripeaux d’idéalisme, avec ce saint nom, avec ce nom faux d’humanité ! …

Elle s’acharnait. Elle se calomniait… Blottie sur elle, le menton sur les poings, les coudes repliés, elle serrait sur ses flancs la défaite humiliée…

Elle s’était terrée dans une petite bourgade,