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Annette n’avait point repris le chemin de Paris. Elle échoua, en route, à une station perdue, où nul ne viendrait la chercher. Elle était désemparée. Il lui fallait refaire ses comptes avec elle-même. Il lui fallait retrouver sa direction.

La fatigue des derniers mois se faisait, soudain, accablante : cette tension continue, ce dernier choc qui avait réveillé le sentiment cuisant de l’âge irrémédiable et le vain besoin de l’amour, de l’amour entier, qu’elle n’avait jamais eu. Une mélancolie, sans forme et épuisante. Tout ce don de soi, pour quoi ? Maintenant qu’elle avait tout donné et tout abandonné, elle se retrouvait terriblement libre. Les liens brisés. Mais où se tenir, s’ils ne vous tiennent ? Elle n’avait plus où s’accrocher… Le pire de tout : elle n’avait plus elle ; elle ne croyait plus en soi, elle ne croyait plus à sa croyance en l’humanité… Quel pire désastre !