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du terrain, des nuances, une harmonie. — Mais Annette ne s’arrêtait point. Elle marchait, hautaine, distraite, sans détourner la tête, le sourcil froncé. Elle ressentait un dédain irrité pour ces esprits d’artistes, inconsistants, où chaque minute chasse la minute d’avant : au travers, la vie et la mort passent, comme par un tamis…

Elle attaqua une pente escarpée, qui menait à un plateau rocheux, étroit et allongé, en forme de selle. Elle la gravit, d’une haleine. Le ciel était, là-haut, clair et dur, comme les prunelles de Mlle  de Wintergrün. Mais le vent du printemps, frais et fort, qui balayait les cimes, ruisselait sur la pente, en inclinant les tiges des herbes allongées. Il fouettait à la face Annette et son compagnon. Dans un évidement des terres éboulées, à l’abri d’un bouquet d’arbres nains et tordus, sur un versant du mont, ils s’assirent. Des pâturages tombaient à pente rapide vers un torrent, au fond. Autour, le cercle du ciel de métal blanc, ourlé, aux bords, d’une frange de nuées sombres, amoncelées comme des flots qui se brisent aux falaises des cimes.

Annette était assise sur la menthe sauvage et le chaume, que chauffaient les derniers rayons du